Revue de Presse Cahiers Sade 1

Cahiers Sade 1

sitaudis.fr
16 octobre 2020
Jacques Barbaut, écrivain et poète

Aux Éditions les Cahiers (après les séries en cours « Aragon », « Artaud », « Bataille », « Laure » et « Leiris »), volume déclaré in memoriam Pierre Guyotat, sous une livrée intensément noire qui lui sied — encre, corbeau ou charbon — qu’éclairent polychromiquement (quasi-vitraux) onze reproductions en couleurs de tableaux de Clovis Trouille, celui qui « peignait pour mériter dix ans de prison », présenté par Clémentine D. Calcutta, « une peinture kitsch, un art pompier, narratif et clinquant, une facture désuète et de mauvais goût » : les Cahiers Sade, numéro un.

Un exergue en guise de manifeste qui invite à imaginer la « sadologie », une « science de l’indicible rendue dicible », qui « pourrait peut-être » [double mode conditionnel] « nous permettre de penser l’horreur, de lui donner une structure, un fondement, une cause, et de comprendre quelques-uns des enjeux fondamentaux de nos sociétés contemporaines »… et quelques-unes de leurs réalisations ou dérives (choisissez votre camp) actives actuelles : publication du livre-choc Sodoma, Enquête au cœur du Vatican, pédophilie organisée dans l’Eglise, scandale des religieuses abusées, suicide express en prison de Jeffrey Epstein (j’en passe et des pires…).

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Sade 1

Libr-critique
31 octobre 2020
Christophe Stolowicki, écrivain et journaliste

Accepter de partager son Sade, celui dont on est le lecteur unique – comme en coda de Sodome et Gomorrhe les « solitaires » de Proust découvrent qu’ils sont légion.  Comment s’en dispenser, devant la multiple évidence. « Il y a un fonds de De Sade masqué, mais non point méconnaissable, dans les inspirations de deux ou trois de nos romanciers les plus accrédités », écrit Sainte-Beuve. Yanan Shen traite de l’image de Sade dans les romans noirs de Pétrus Borel (1809-1859). Flaubert a des pensées affectueuses pour « le vieux ». Il aura fallu plus d’un siècle d’incubation, de différé, de latence, pour qu’éclate au grand jour le génie si éminemment français de Sade. (« Sade et Céline ne sont pensables qu’en français », dit dans son interview Philippe Sollers, peu gêné d’associer une âme aristocratique à une âme de boue.) – C’est peu de choses quand on pense qu’il a fallu plus de deux millénaires à Héraclite.

Génie si français et génie du français, Sade a infusé un sang neuf à la langue du dix-huitième où tout le monde versifiait et où la poésie était quasiment morte, donnant à l’athéisme tout en traits d’esprit de Voltaire et autres « philosophes » ses lettres de fureur et de noblesse.  Ce qui vaut à ce cahier de s’inscrire en fond sous l’égide de la poésie.

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